CONAN LORD CARNETS SECRETS D'UN CAMBRIOLEUR - SERGE BRUSSOLO
Un trio de voleurs est engagé par un mystérieux commanditaire afin de mettre la main sur un tableau qui permettrait d’identifier le responsable d’une série de meurtres particulièrement horribles commis une dizaine d’années plus tôt. Usant d’un subterfuge pour s’introduire dans la demeure où le tableau est censé être dissimulé, les trois cambrioleurs vont découvrir que l’antique demeure recèle bien d’autres secrets.
Ce premier opus des aventures de Conan Lord est un Brussolo pur jus. Les fans du maître français du thriller y seront donc en terrain connu et retrouveront avec plaisir l’habituel cortège de personnages hors normes, d’idées géniales et farfelues, de rebondissements incessants. Ici, c’est un trio de freaks qui donne le La. Derrière le nom de Conan Lord et la légende de la gueule cassée reconvertie en gentleman cambrioleur se cache en effet trois enfants de la balle contraints de voler pour survivre à la faillite de leur cirque. Nous accompagnons donc la dompteuse de fauves, le lilliputien et l’homme obus dans leur tentative de s’emparer d’un tableau d’une valeur toute particulière.
Si les trois personnages sont assez attachants grâce à leurs faiblesses et leurs addictions, le décor et l’époque n’apportent pas grand-chose à l’intrigue. Le Londres d’après-guerre avec ses ruines, ses rationnements et sa populace encore groggy offrait sans doute beaucoup plus de possibilités. Ici, ce back-ground n’est qu’entre aperçu, sous employé même, et l’on doit se contenter comme souvent dans les romans de l’auteur, d’une mystérieuse et labyrinthique demeure qui fut le théâtre d’évènements dramatiques.
L’ambiance est donc plutôt décevante mais c’est surtout la construction du roman qui constitue son principal défaut. L’intrigue autour du fameux tableau se déplace vite vers d’autres mystères et les suspects (de vol, de recel, de meurtre…) se multiplient au fur et à mesure que de nouvelles découvertes se font jour. Ce jeu de fausses pistes et de révélations multiples est certes la marque de fabrique de l’auteur mais ici, il m’a semblé moins convaincant que d’habitude, plus artificiel. Un peu comme si l’auteur s’était aperçu en cours de route que l’idée de départ n’allait pas le mener assez loin et qu’il lui fallait alors meubler du mieux qu’il pouvait. Cela nous donne au final un roman assez prenant mais qui laisse un goût légèrement insipide, comme un bonbon périmé.
Le Masque - 1995