LES ENVOUTEES / LA FILLE AU DOUBLE CERVEAU - JEAN DE LA HIRE
Madeleine et Lucie Font-Romain ont été envoûtées par un puissant médium qui entend faire d’elles ses esclaves. Leurs fiancés, Maxime Lystrac et Paul d’Oria, aidés par Edmond Royer, un policier versé dans les sciences occultes et par Léna Christiansen, une jeune danoise, vont tenter de faire barrage aux sombres visées du spirite. Ils ignorent qu’ils se préparent à affronter une organisation redoutable dirigée par un esprit brillant et sans scrupules.
Il est des livres qui, alors même qu’ils ne sont pas si vieux que cela, ont vraiment mal vieillis. C’est le cas de ces romans de Jean de la Hire écrits il y a une soixantaine d’années mais qui en paraissent infiniment plus. Tout y est en effet très, très daté. L'écriture est passablement désuète sans pour autant avoir l'intérêt stylistique d'un roman du XIXème et les personnages sont abominablement démodés, lisses et sans saveur. Les héros y sont de beaux jeunes gens bien propres sur eux, courageux et prêt à faire le don de leur vie pour faire triompher l’amour et le bon droit. Les méchants sont d’infâmes crapules ne cherchant qu’à assouvir leurs sinistres passions. Aucune nuance, guère de doutes, les uns sont blancs, les autres noirs et seule la chute nous réserve une petite surprise.
L’histoire quant à elle, fait penser à ces vieux James Bond où il est question d’un dangereux mégalomane qui veut devenir maître du monde grâce à sa fortune ou une invention extraordinaire. Le comte d’Armanza a effectivement tout du Grand Méchant qui dirige ses affidés à partir de son repaire secret, ici un laboratoire ultra moderne caché derrière les remparts d’une forteresse médiévale. Bien qu’il s’agisse d’un sujet maintes et maintes fois utilisées, en littérature comme au cinéma, ce n’est pas ce manque d’originalité qui m’a gêné, mais la façon dont il est traité ainsi que le changement radical qui s’opère entre les deux volumes.
Le premier possède le charme discret d’une histoire un peu provinciale. On séjourne en Touraine, en Bretagne ou dans l'Hérault en compagnie de personnages tout simples projetés au coeur d'une aventure dangereuse. L’enquête est un peu simplette mais bien amenée, riche de détails en tout genre et la lutte inégale qui s’engage entre les victimes et le puissant médium n’est pas déplaisante à suivre.
Avec « La fille au double cerveau », la donne change. Exit Edmond Royer, Maxime Lystrac, Paul d’Oria et Lena Christiansen. Tous les personnages qui étaient au cœur de l’intrigue ne réapparaîtront plus alors que d’autres apparaissent ex abrupto. Une espionne russe, un diplomate périgourdin, un jésuite entrent dans la danse et l’on est projeté dans une histoire d’espionnage (James Bond again) avec commandos, filatures et séquences de drague dans les meilleurs hôtels de la Riviera. Tout cela se termine comme de juste par la destruction du repaire, la mort de l’affreux et les tendres retrouvailles de nos gentils héros.
C’est donc un récit très convenu que nous a pondu-là le très prolifique Jean de la Hire. On lui reconnaîtra néanmoins le mérite d’avoir tenté de renouveler les bons vieux thèmes de la possession et des médiums en les associant à des éléments d’ordre scientifique (poupées vaudou et hypnose d’un côté, prises de sang, photographies et enregistrements sonores de l’autre). Cela donne un mélange qui aurait pu être passionnant s’il avait été traité avec davantage de maîtrise et de conviction.
Jaeger D'Hauteville - Fantastic - 1954