LA FLAMME NOIRE - STANLEY G. WEINBAUM
Après le gigantesque cataclysme qui a ravagé la planète, les Etats-Unis comme le reste du monde, sont retourné aux ténèbres de la féodalité et le territoire est morcelé en une multitude de villes-états et de communautés paysannes rivales et inégalitaires. Toutefois, une nouvelle renaissance s'annonce sous la houlette de Joaquin et Margareth Smith, des conquérants visionnaires et immortels qui tentent d'imposer leur paix au monde. A plusieurs siècles d'intervalle, il trouveront sur leur route deux hommes bien déterminés à s'opposer à leur projet.
"La flamme noire" est un roman de SF qui aborde de nombreux thèmes à commencer par le post apo qui donne au récit son cadre général, mais aussi l'immortalité, le voyage dans le temps ou les manipulations génétiques. Mais ce livre est aussi et surtout un bel exemple de récit dystopique.
La société mise en place par Joaquin Smith a en effet toutes les apparences de l'utopie qui a mal tourné. Son régime est quasi dictatorial et concentre tous les pouvoirs entre les mains de quelques immortels. La population est étroitement surveillée (des hologrammes qui vous suivent pas à pas, des caméras partout...) et toute protestation sévèrement réprimée. Pourtant, ce sont des considérations humanistes qui l'ont poussé à accaparer le pouvoir.
L'expérience d'une longue vie et le retour à la barbarie dont il a été le témoin l'ont convaincus que les hommes faisaient trop souvent un mauvais usage de leur liberté et qu'il était nécessaire de leur imposer la paix, fut-ce au prix de leur libre arbitre.
La peinture de ce monde sous contrôle permet à l'auteur quelques jolies réflexions sur le pouvoir mais aussi de chouettes descriptions d'une technologie qui se veut futuriste. Il est à ce propos amusant de constater que Stanley Weinbaum, enfant de son époque, a axé les découvertes de ses savants sur l'électricité et le nucléaire, des énergies encore relativement neuves et pleines de promesses dans les années trente.
Il s'est aussi laissé aller à quelques idées farfelues dont ces "dormeurs" plongés en catalepsie volontaire pendant plusieurs siècles et qui espèrent à leur réveil jouir des intérêts accumulés de leurs placements.
Il me faut enfin dire un mot de cette "Flamme noire" qui donne son titre au roman et illustre de si belle manière la couverture de ce livre. Immortelle comme son frère, Margaret Smith n'est malheureusement pas soutenue par le même idéal. Elle n'a pas devant elle de grand œuvre à réaliser et continue d'être la proie de ses désirs et de ses émotions. Elle succombera d'ailleurs à deux reprises à des hommes pourtant déterminés à entraver la politique de son frère et déjà engagés auprès d'une autre femme. Heureusement pour elle ces deux aventures ne connaîtront pas la même conclusion et Steinbaum terminera son récit sur une happy-end un peu surprenante et à contre-courant de son histoire.
Un peu trop romanesque à mon goût, ce livre n'a pas trop mal vieilli et mérite qu'on lui consacre quelques heures. A condition de mettre la main dessus !
Hachette - Le Rayon Fantastique - 1956