Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
SF EMOI
19 février 2018

AU PAYS DES RICHES OISIFS - STEPHEN LEACOCK

Couv%20Leaco-225

A Plutoria, la bonne société vaque à ses occupations mondaines. Entre les diners au club, les repas au Grand Palaver, les « party » à Castel Casteggio et la messe du dimanche, pas le temps de s’ennuyer. Mais l’on trouve toujours quelques minutes pour gagner un petit million de dollars, acheter une usine ou briguer un poste au conseil municipal… 

Stephen Leacock - 1869-1944 - écrivit « Au pays des riches oisifs » en 1914, époque désormais bien lointaine où le capitalisme et les bouleversements socio-économiques qu’il induisit n’en étaient encore qu’à leurs balbutiements. Pourtant, la société de nantis qu’il dépeint dans son roman, le monde des affaires et de la finance qu’il nous montre, tout cela ressemble à s’y méprendre à ce que nous connaissons encore aujourd’hui. Et oui ! Cent ans sont passés sans presque aucun changement. Comme il est triste de constater que malgré les progrès techniques et médicaux, malgré une meilleure éducation des masses et une plus grande circulation de l’information, une part toujours plus importante de la population mondiale vit dans la misère. Comme il est douloureux de songer que malgré deux guerres mondiales et quelques révolutions, la même classe et les même dynasties sont parvenues à conserver leurs privilèges, phagocytant le pouvoir et accumulant les richesses.

Cette classe dirigeante, ces « riches oisifs », l’auteur a choisi d’en faire la critique par le biais d’une satire sociale amusante et néanmoins extrêmement corrosive. Avec un humour gentiment féroce et un air de ne pas y toucher il brocarde la grande bourgeoisie de Plutoria, ses petits défauts et ses grands travers. Et qu’importe si Plutoria n’existe pas vraiment. Elle a quantité de sœurs jumelles, en Europe ou de l’autre côté de l’Atlantique. En fait, on retrouve un peu partout dans le monde ces havres de paix où tout n’est que luxe, calme et volupté, avec leurs avenues ombragées, leurs villas somptueuses et leurs mignonnes églises où l’on vient davantage pour se montrer que pour se recueillir.

Les heureux membres de ce monde parfait où l’on vit entre soi, Leacock les égratigne les uns après les autres.  Il le fait d’une manière redoutablement subtile et l’on en viendrait presque à plaindre ces riches inutiles tels le pauvre Peter Spillikins qui passe à côté du véritable amour pour s’être laissé aveugler par le strass et les paillettes, la ridicule Mme Rasselyer-Brown victime d’un excès de spiritualité ou encore les Newberry qui acceptent la tyrannie horticole de leur jardinier pour le seul plaisir d’en mettre plein la vue à leurs hôtes. Mais il y a aussi des universitaires imbus d’eux-mêmes et des curés mondains, des directeurs de clubs selects et de riches héritières, toute une kyrielle d’individus égoïstes et superficiels mais aussi fort drôles et, disons-le, plutôt sympathiques.

Heureusement le dernier chapitre nous rappelle fort opportunément leur véritable nature, celles d’hommes et de femmes prêts à tous pour maintenir leur statut social, y compris recourir à la corruption et à la concussion. Ils sont les ancêtres de ceux et celles dont les noms s’étalent à la une de la presse people ou dans les pages de l’actualité politico-judiciaire de nos magazines, nous prouvant sans conteste que ce roman demeure d’une surprenante actualité.

En rééditant cette moderne antiquité les éditions Wombat nous rappellent qu’il ne faut jamais cesser de se moquer des puissants, surtout lorsqu’ils nous prennent pour des cons. Ca ne change peut-être pas les choses mais ça permet d’en rire. Toujours ça de pris !

Editions Wombat - Les Insensés - 2018

Publicité
Publicité
Commentaires

FLEUVE NOIR
fl no
ANTICIPATION

 

 

Publicité
SF EMOI
  • Blog consacré à mes lectures dans les domaines de la fantasy, du fantastique et de la science fiction. Mais comme je ne suis pas sectaire et que mes goût sont assez éclectiques, il n'est pas exclu que j'y parle aussi d'un bon polar ou d'un essai.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Newsletter
Archives
Publicité