BELLEVILLE BARCELONE - PATRICK PECHEROT
Nestor, détective de l'agence Bohman, est engagé par un riche industriel pour mettre un terme à l'idylle que sa fille entretient avec un ouvrier communiste. Une affaire a priori facile mais qui va le plonger au cœur de la lutte qui oppose communistes et trotskystes à la veille de la seconde guerre mondiale.
"Belleville Barcelone" est le second des trois romans que François Pécherot a consacré au personnage de Nestor, détective privé dans le Paris d'avant-guerre. Cette fois-ci nous sommes en 1938, période troublée s'il en est entre guerre d'Espagne et Anschluss, procès de Moscou et chute du gouvernement Blum.
Si l'enquête n'est pas absolument palpitante et si la chute ne casse pas trois pattes à un canard, c'est malgré tout l'occasion d'y voir plus clair sur les coulisses de la guerre d'Espagne et notamment la façon dont Staline s'y est pris pour éliminer les trotskystes et les anarchistes du POUM.
Rien d'étonnant donc, à ce que l'on croise un peu de tout dans les quartiers populos de Paname : des gauchistes de tout bord, des fascistes et même des surréalistes en la personne de Dédé Breton lui-même qui filera un coup de pogne à notre détective.
Le style de Pécherot, teinté d'argot et d'ironie, fait mouche. Il a le don de faire revivre cette époque grâce à une foule de petits riens : l'odeur de savon dans les bains publics, la goualante de Fréhel, la lassitude des filles dans un claque de la rue Paradis... Sous sa plume, c'est tout un petit monde industrieux qui s'offre à nos yeux. Celui des débardeurs du canal de l'Ourcq, des bougnats et des lavandières, des rempailleuses et des concepiges...
Les personnages aussi sont bien plaisants, Nestor en tête, privé presque caricatural dont on se demande s'il a une vie en dehors de son boulot, mais aussi les seconds rôles : la jolie Yvette qui pour être myope n'en a pas pour autant froid aux yeux, le grand Swami, croque-mort le jour et illusionniste le soir et Gopian le restaurateur arménien.
Tout cela nous donne un bon petit polar que l'on lira davantage pour son ambiance que pour son suspens.
Gallimard - Folio Policier - 2007