QUINZINZINZILI - REGIS MESSAC
Alors que la coalition germano-japonaise et le bloc russo-américain se livrent une guerre enragée, Gérard Dumaurier visite une grotte sur les hauteurs de la Lozère en compagnie d'un groupe d'enfants. Miraculeusement sauvés des effets dévastateurs des armes chimiques et du cataclysme écologique qui s'ensuivit, les survivants se trouvent soudainement ramenés à une existence extrêmement précaire.
Ceux qui suivent ce blog le savent, j’ai un gros faible pour les récits post-apocalyptiques. J'en ai déjà lu une bonne centaine et parmi ceux-là, « La terre demeure » est incontestablement l’un de mes favoris. Dans cet excellent roman, George Stewart met en scène un personnage qui vit dans la crainte d’un retour à la barbarie et s’acharne, envers et contre tous, à entretenir la flamme de la connaissance.
Des scrupules que le héros de « Quinzinzinzili » ne partage assurément pas. Lui se moque éperdument de ce qui peut advenir des quelques enfants dont il partage le quotidien. A sa décharge, on signalera que l'humanité dont il est l'un des derniers représentants vient de s'annihiler avec une férocité et une bêtise inouïe. Désabusé, profondément déçu par la nature humaine, il en vient à se demander s'il ne vaudrait pas mieux que celle-ci disparaisse définitivement : "Quand je songe à l'avenir, je vois un nouveau calvaire collectif, une nouvelle ascension pénible et douloureuse vers un paradis illusoire, une longue suite de crimes, d'horreurs et de souffrances."
Il n'est donc pas très enclin à venir en aide aux neuf petits survivants et c'est d'un ton éminemment sarcastique qu'il nous décrit leurs tribulations. Sous son œil moqueur nous assistons à une régression intellectuelle aussi rapide que totale. Trop peut-être car, s'il est amusant de voir le "parler" des jeunes sauvageons se simplifier à l'extrême, si l'on rit de leurs réactions apeurées face aux vestiges de la civilisation, si l'on suit avec intérêt les querelles de pouvoir et d'ego, on a tout de même un peu de mal à concevoir que tout cela survienne en si peu de temps.
Cet aspect du roman fait bien entendu penser à "Sa majesté des mouches" qui met également en scène un groupe d'enfants livrés à eux-mêmes. Mais le roman de William Golding nous montre avec beaucoup plus de finesse les mécanismes à l’œuvre dans la mise en place d'une société tribale. C'est donc plutôt du roman d'Ernest Perochon (Les hommes frénétiques) que celui de Régis Messac se rapproche le plus. Les deux histoires partagent en effet les mêmes descriptions cauchemardesques des conséquences d'une guerre totale et l'idée que la survie de l'espèce sera le fait de jeunes crétins.
L'Arbre vengeur - L'Alambic - 2007