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6 janvier 2019

LE SENTIMENT DU FER - JEAN-PHILIPPE JAWORSKI

moutons198-2017

Enchanté par ma lecture de Janua Vera, je n’ai pas tardé à éprouver l’irrépressible besoin de retourner baguenauder du côté du Vieux Royaume. J’ai d’abord été tenté par l’idée de Gagner la guerre mais devant l’ampleur de la tâche (et son nombre de pages) j’ai jugé plus raisonnable de m’en tenir à ce petit recueil où j’ai retrouvé presque tout ce qui m’avait séduit la première fois et en premier lieu la magnifique écriture de Jean-Philippe Jaworski. D’une finesse et d’une richesse hors pairs, elle contribue pour une très large part au plaisir de la lecture. Précise et délicate, ronflante ou intimiste, recherchée sans être pédante, elle sait aussi se faire changeante comme en témoigne la façon dont elle nous restitue le caractère et la personnalité des différents personnages au travers de leur langage : la gouaille du maître assassin, le parler ampoulé du troubadour, la cautèle du voleur, le ton de commandement d’un seigneur nain… Une parfaite réussite qui accompagne admirablement le récit et facilite grandement notre immersion dans l’univers de l’auteur.

Si la forme est admirable, le fond n’est pas en reste. C’est de guerre que nous parle ici Maître Jaworski. La guerre sous toutes ses facettes avec ses artisans, ses victimes et ses atrocités. Il nous fait tour à tour ressentir l’atmosphère d’urgence et de fébrilité d’une ville qui s’apprête à subir un siège, le dégoût suscité par les méfaits d’une bande de soudards ou l’horreur d’un champ de bataille au petit matin quand voleurs et détrousseurs récoltent leur ignoble provende. Il nous entrainera aussi dans une expédition guerrière à travers montagnes et cavernes puis nous fera assister à un épisode de la lutte souterraine que se livrent sorciers et magiciens. Cinq nouvelles que rapproche un thème commun mais qui demeurent néanmoins très différentes grâce au ton et à la nature des héros qu’il nous propose avec en prime, des chutes toujours inattendues et la plupart du temps fort caustiques.

Le sentiment du fer nous ramène à Ciudalia, capitale de cette république corrompue où s’affrontent condottiere et sénateurs dans un jeu de pouvoir où les assassins jouent les arbitres. Alors que la cité s’attend à être investie d’un jour à l’autre par les troupes du roi Maddan, nous suivons le maître assassin Cuervo Moera chargé de récupérer un manuscrit de grande valeur dans la demeure d’un illustre patricien. Un récit vif et haletant dans lequel un malfrat de la pire espèce se transforme sous nos yeux en héros de légende.

Dans L’elfe et les égorgeurs nous retrouvons l’elfe Annoeth qui faisait déjà une courte apparition dans Janua Vera. Et c’est de nouveau un petit bijou - de drôlerie et de cynisme cette fois – où nous voyons le troubadour aux oreilles pointues se jouer d’un quatuor de reîtres et démontrer ainsi la supériorité de l’intelligence et de la parole sur la force brute. S’il pouvait en aller toujours ainsi !

Profanation se présente sous la forme du procès d’un détrousseur de cadavre. En un long monologue à peine entrecoupé par les questions des prêtres du desséché qui président le tribunal, le prévenu Sabaude Cufart témoigne de la présence de morts vivants dans les contrées ravagées par la guerre. Un récit époustouflant de maîtrise, porté par l’aplomb et la parfaite mauvaise foi de l’ignoble sacripant.

Avec Désolation, Jaworski adresse un gros clin d’œil à Tolkien en mettant en scène des nains et des gobelins qui s’affrontent dans un décor qui ressemble à s’y méprendre à la Moria et à la désolation de Smaug. Mais les similitudes s’arrêtent là. Hjalmberich n’est pas Gimli et le dragon veille ici sur un secret bien plus précieux qu’une montagne d’or…

La troisième hypostase est un récit plus introspectif qui nous dévoile les états d’âme de la magicienne Lusinga séparée de ses compagnons elfes partis guerroyer en Léomance. D’abord purement mélancolique, le récit sombre peu à peu dans la noirceur et dans la peur avec l’apparition des archontes du Desséché.

Les Moutons Electriques - Hélios - 2017

 

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Commentaires
F
Je ne suis pas très "Fantasy" et les critiques, qu'elles soient positives ou négatives, que j'ai lu sur cet écrivain ne m'engagent pas trop à le lire. Bref, je passe. ;)
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T
Mais lis donc "Gagner la guerre" ! Tu vas ADORER ça, bigre de bougre !
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FLEUVE NOIR
fl no
ANTICIPATION

 

 

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  • Blog consacré à mes lectures dans les domaines de la fantasy, du fantastique et de la science fiction. Mais comme je ne suis pas sectaire et que mes goût sont assez éclectiques, il n'est pas exclu que j'y parle aussi d'un bon polar ou d'un essai.
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