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SF EMOI
3 mai 2014

LE DEUXIEME MATIN DU MONDE - MANUEL DE PEDROLO

deuxieme-matin-du-monde--le-Une attaque foudroyante perpétrée par de mystérieux extra-terrestres signe la quasi extinction de l'espèce humaine. Tous les mammifères, hommes et animaux, sont victime d'un arrêt cardiaque tandis que de puissantes vibrations mettent à bas les constructions. A Bénaura près de Barcelone, Alba et Didac deux enfants de quatorze et neuf ans qui étaient immergés au moment de l'attaque, sont les seuls survivants. Dans ce monde bouleversé, ils vont devoir apprendre à survivre pour, peut-être, donner une seconde chance à l'humanité.

J'étais vraiment curieux de découvrir ce roman écrit par un auteur catalan dans les années soixante-dix. Pensez-donc, un post-apo destiné à la jeunesse ! Voilà qui tenait de la gageure. Vu l'aspect plutôt rude du thème en question, je me demandais comment l'auteur allait s'y prendre pour éviter de choquer ses lecteurs sans pour autant édulcorer son propos.

Mais Manuel de Pedrolo s'en sort parfaitement. Aucun des aspects les plus dramatiques du genre n'est éludé. « Dans un monde réduit à l'état de cimetière », ses personnages sont bel et bien confrontés aux multiples dangers de « l'après ». Ils doivent faire face à la peur et à la maladie, se défier des autres survivants et trouver leur pitance dans les ruines des cités. Ils leur faut aussi surmonter la disparition de leur proches et accepter leur solitude. Être le dernier couple n'est pas chose aisée à vivre et implique bien des responsabilités.

Bref aucune censure, aucun sujet tabou. L'auteur évoque aussi bien la mort que la sexualité et l'inceste est envisagé comme une alternative nécessaire au repeuplement. Il en profite même pour aborder des sujets qui semblent lui tenir à cœur tels que le racisme (Nous sommes la dernière blanche et le dernier noir, Didac. Après nous plus personne ne pensera à la couleur de la peau.) ou la religion (Tout çà, c'était pour faire peur aux gens, pour les faire obéir et les obliger à se résigner.). Il le fait sans fausse pudeur, avec des mots simples et directs.

Il nous livre également par l'intermédiaire d'Alba, sa vision de la société idéale, libérée de l'hypocrisie et des croyances toutes faites. Ses personnages ne veulent pas seulement survivre, ils veulent aussi s'affranchir des anciennes règles et poser les fondations d'un monde nouveau. Ils désirent néanmoins conserver le meilleur de la civilisation qui va bientôt disparaître ( « Alba songea avec mélancolie à toutes ces richesses, là et ailleurs, qui allaient se perdre à tout jamais. Après l'homme, c'était son patrimoine qui disparaissait. ») et sauver ce qui en vaut la peine : les œuvres d'art et les livres.

Des livres qui sont au centre du roman et au cœur des préoccupations des jeunes survivants. Que ce soit pour l'acquisition de connaissances (notions de médecine, apprentissage de la mécanique...) pour leurs loisirs (les polars que lit Alba) ou simplement pour l'objet lui-même (livres anciens ou beauté des illustrations) ils n'auront de cesse de les rechercher, de s'en entourer et d'assurer leurs préservation.

Finalement, et c'est paradoxal, le seul petit défaut de ce livre est aussi sa principale qualité. Pedrolo destinant son roman aux enfants, il était important d'avoir pour héros des personnages auxquels son lectorat puisse s'identifier. De ce point de vue c'est parfaitement réussi. Didac et Alba sont deux jeunes ados particulièrement débrouillards dans lesquels tous les gamins voudront se reconnaître. Mais cela nuit un peu à la vraisemblance de l'histoire.

On a en effet du mal à accepter que deux enfants de neuf et quatorze ans puissent à eux seuls remettre l'humanité sur de bons rails. Certes, le désespoir pousse à se transcender et l'on peut admettre que des enfants aient moins de mal que des adultes à se projeter dans une existence nouvelle («... eux étaient restés sains d'esprit et avaient su s'adapter, mais ils étaient deux et très jeunes, un facteur qui avait son importance »). La tâche n'en demeure pas moins extrêmement rude. Leur bagage initial n'est pas suffisant, l'apprentissage prend du temps et l'expérience ne peut se remplacer. D'ailleurs, les réactions ou les idées d'Alba ne sont pas en accord avec son jeune âge. Elle a une approche trop réfléchie et trop globale de leur situation ainsi qu'une vision à trop long terme. Les enfants, me semble-t-il, ne se projettent pas autant. Ils vivent dans le présent et ont des préoccupations moins abstraites. Ceci étant, la triste fin du roman vient justement rappeler que tout n'est pas si rose pour nos petits héros et redonne à l'histoire sa dimension tragique. 

"Le deuxième matin du monde"est donc un excellent roman jeunesse mais les adultes y trouveront également leur compte. C'est en tous cas un très bon post-apo que je vais m'empresser de faire découvrir à ma fille.

Le livre de Poche - Jeunesse - 1993

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FLEUVE NOIR
fl no
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  • Blog consacré à mes lectures dans les domaines de la fantasy, du fantastique et de la science fiction. Mais comme je ne suis pas sectaire et que mes goût sont assez éclectiques, il n'est pas exclu que j'y parle aussi d'un bon polar ou d'un essai.
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