Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
SF EMOI
16 mai 2013

LE DOCTEUR MYSTERE - PAUL D'IVOI

untitled

Cigale est un orphelin d'une douzaine d'années qui a quitté son Paris natal pour la Bretagne où il travaille comme mousse à bord d'un bateau de pêche. Une nuit que son embarcation rejoint le port d'Audierne, il se jette à l'eau pour sauver une jeune indienne de la noyade. Retrouvés inanimés, les deux adolescents sont secourus par un étrange docteur, indien lui aussi, qui se propose de veiller sur la miraculée et la ramener dans son pays.

Cigale décide de l'accompagner pour l'aider à faire la lumière sur le passé de la petite Anoor. Commence alors un long périple à travers la péninsule indienne qui les verra secourir la sœur de leur petite protégée, dépositaire d'un lourd secret. Ils devront pour cela lutter contre la toute puissante caste brahmanique alliée de l'oppresseur anglais et déjouer les pièges de l'infâme Arkabad. Mais le docteur Mystère ne manque pas de ressources ni Cigale d'astuce. 

Exit la famille Lavarède, place à Cigale ! Ce septième volet des voyages excentriques nous propose en effet un nouveau héros. Un adolescent au grand cœur, l'un de ces orphelins courageux tels que les aime le roman populaire. Cigale, c'est l'éternel gavroche, le titi parisien, le gamin de Paris cher à Boussenard. Gouailleur et débrouillard, indépendant quoique fidèle, moqueur mais sentimental, il incarne aux yeux de Paul d'Ivoi la quintessence de l'esprit français.

Il ne sera toutefois pas seul à tenir le haut de l'affiche et cède même le premier rôle à ce mystérieux docteur qui donne son titre au roman. Un personnage qui doit beaucoup au capitaine Némo avec lequel il partage nationalité, connaissances scientifiques et famille décimée par les anglais et leurs alliés. D'ailleurs, comme le héros de Jules Verne, il s'en prendra aux intérêts britanniques et c'est donc sans surprise qu'il sera question de lutte et de rébellion contre l'occupant.

Mais sur un ton beaucoup moins dramatique que dans La capitaine Nilia. Certes, les anglais y sont toujours les dindons de l'histoire et leur empire colonial est une fois encore ébranlé. Mais les attaques de Paul d'Ivoi sont redevenues bon enfant et c'est avec humour qu'il continue ses piques envers les infortunés rosbeefs. Il se moque de leur flegme assimilé à de la fainéantise, les affuble de noms grotesques (Capitaine Bullfrog), souligne leur mercantilisme et les place dans les positions les plus ridicules. Somme toute rien de bien méchant. Les plus mauvais rôles ne leur sont pas dévolus et l'on se contente de rire à leur dépens.

On se moquera ainsi de Ellick et Loo, les gras et roses commissaires assermentés suant sang et eau sous le soleil indien, de Fathen père et fils, gouverneurs du Penjab aussi incompétents que âpres au gain et surtout de la tribu Sanders-Van Stoon, famille recomposée anglo néerlandaise en proie aux incessantes disputes entre mari et femme au sujet de la guerre du Transvaal.

Mais il y a bien d'autres personnages dont un couple d'italiens excessivement romanesques, un équipage de marins bretons transformés en pilotes de véhicule expérimental et un ours de Sumatra qui remplace avantageusement Hope l'orang-outang (cf : Corsaire Triplex et La capitaine Nilia). N'oublions pas non plus un méchant bien vicieux, j'ai nommé Arkabad, l'exécuteur des brahmes d 'Ellora, individu infâme qui dissimule sa duplicité sous toute sorte de déguisements.

Ainsi que je l'ai dit plus haut, l'intrigue ne se distingue guère des précédents romans de l'auteur. Une banale histoire de trésor caché et d'orphelines qu'il faut secourir. Le rythme est néanmoins effréné et nous voilà lancés dans une longue course poursuite ponctuée de nombreux enlèvements et de non moins nombreuses évasions. Il y a aussi des sacrifices et des rites initiatiques, des sectes et des sociétés secrètes, le tout dans des décors propres à frapper les imaginations : palais orientaux, temples souterrains, cromlechs et nécropoles. Bref, un joli voyage à travers une Inde de carte postale peuplée de fakirs, de tigres et d'éléphants.

Bien entendu, l'auteur nous donne notre habituelle leçon de choses. Il le fait au travers des explications que Mystère dispense à ses petits compagnons et qui portent cette fois-ci sur les méfaits de l'alcool et sur la nature des ondes électriques : volts, ampères, watts, ohms et coulombs.

Du côté des inventions, c'est encore la fée électricité qui est à l'honneur : cannes foudroyantes, cottes de maille électriques et la fameuse Maison d'aluminium, wagon d'une dizaine de mètres mu lui aussi par l'énergie électrique et qui n'est pas sans rappeler le Karrovarka de La Diane de l'archipel. Mais le plus innovant est sans conteste ce dispositif étrange qui permet de capter les flux électriques ou thermiques dégagés par tous corps, inanimés ou vivants, et de les restituer sous la forme d'images impressionnant une plaque de cuivre.

Je terminerais cette présentation en m'interrogeant sur l'état d'esprit de Paul d'Ivoi à l'égard des populations indigènes puisqu'il fait dire à Cigale au sujet de sa compagne : ...nulle européenne ne me semble aussi jolie, aussi digne de tendresse que vous, puis, quelques pages plus loin, s'exclamer à propos des frères de race de sa belle : Il s'agit de ne pas perdre la trace de ces macaques au teint de chocolat.

J'ai Lu - Voyages Excentriques - 1983

 

Publicité
Publicité
Commentaires
L
Oui, c'est tout à fait ça : un livre qui a beaucoup vieilli, bourré de petits défauts mais dont la lecture est extrêmement rafraichissante et divertissante. <br /> <br /> Si tu souhaites découvrir la suite des aventures de Cigale, il te faut lire "Cigale en Chine". Tu peux d'ailleurs en trouver une petite critique sur ce log.<br /> <br /> Merci pour ton commentaire et au plaisir de lire encore.
Répondre
L
Trouvé chez un bouquiniste, je viens tout juste d'en finir la lecture !<br /> <br /> Comment résister à l'appel d'un livre qui a pour titre "Le Docteur Mystère" ? Tout un programme, et je n'ai pas été déçu...<br /> <br /> Nous avons bien là l'Inde telle que généralement décrite dans les romans feuilletons de cette époque ! Sociétés secrètes d'assassins, tigres affamés, temples occultes, mysticisme et superstitions, nous avons même droits aux jolies princesses hindoues à sauver !<br /> <br /> Et effectivement, comment ne pas penser au Capitaine Nemo en se retrouvant face à ce Docteur Mystère ?<br /> <br /> Paul d'Ivoi est loin d'avoir le talent de Jules Verne, mais ce roman se lit avec beaucoup de plaisir... Péripéties improbables, explications scientifiques qui prêtent à sourire aujourd'hui, enlèvements, trahisons, destins tragiques, romances, portraits pittoresques...<br /> <br /> De l'humour également !<br /> <br /> Et le style ne manque pas de panache, belles envolées lyriques, tirades enflammées et parfois même de vrais passages poétiques...<br /> <br /> Par contre, un chauvinisme à toute épreuve, avec des vrais bouts de nationalisme et de colonialisme dedans !! A replacer dans le contexte de l'époque, certes, mais c'en est parfois presque comique...
Répondre

FLEUVE NOIR
fl no
ANTICIPATION

 

 

Publicité
SF EMOI
  • Blog consacré à mes lectures dans les domaines de la fantasy, du fantastique et de la science fiction. Mais comme je ne suis pas sectaire et que mes goût sont assez éclectiques, il n'est pas exclu que j'y parle aussi d'un bon polar ou d'un essai.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Newsletter
Archives
Publicité